Nouvelle rubrique, Chronique de la vie politique française (1): le désert et le déluge, 02 Mars 2021.

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Nouvelle rubrique, Chronique de la vie politique française (1): le désert et le déluge, 02 Mars 2021. 

Le désert et le déluge. (la stratégie du double D)

En ce début ensoleillé et covidé du mois de Mars 2021 se préfigure déjà l’élection présidentielle de 2022 pour le président de la République. Cela se sent, se voit dans certaines décisions et s’entend dans la manière de traiter les oppositions. 

Une douce musique résonne comme un message subliminal, celle du vote incontournable. Emmanuel Macron, ainsi que son camp, sait qu’il ne possède pas une grande popularité dans le pays. Le quinquennat est jusqu’à présent émaillé par des crises puissantes (gilets jaunes, grèves contre la réforme des retraites, incompréhension de la stratégie face au COVID). De plus, la communication présidentielle apparaît comme condescendante avec ses petites phrases ressenties comme brutales ou cyniques. Un fossé s’est creusé tout au long du mandat entre l’exécutif et la plupart des Français.

Cependant, la réélection paraît vraisemblable. Déjà, notre président doit sa première accession à la plus haute fonction au désert de 2017. La gauche de gouvernement (le PS) a été noyée par le quinquennat de François Hollande. Les affaires ont terrassé la droite gaulliste traditionnelle. La place était à prendre. Avec intelligence, opportunisme et culot, il l’a prise. Fort de cette expérience, il sait qu’il peut se passer de l’adhésion populaire pour l’emporter. 

Pour 2022, le désert des opposants semble encore plus inhabité. Le PS n’en finit plus de sombrer dans les abysses. La « gauche de la gauche », incarnée par le PCF, le NPA et surtout la LFI, n’a la visibilité que d’un Mélenchon revanchard, dont la crédibilité a chuté avec sa participation à la manifestation contre l’islamophobie ou avec son comportement violent lors de la perquisition du siège de son parti. Le PCF ou le NPA semblent ne plus représenter que des poussières électorales. Le score formidable de LFI en 2017 a été gâché par les outrances de son chef, de certains de ses lieutenants et le manque de visibilité d’une ligne politique beaucoup plus en réactions qu’en propositions. A gauche, le désert des voix est un ami d’Emmanuel Macron, plus qu’un opposant dont il se soucie. 

A droite, on assiste à une perdition. Les résultats convenables des élections municipales cachent l’incapacité à de nouveau peser au niveau national. Le traumatisme de l’élection présidentielle imperdable, mais perdue, a empêché l’émergence d’un nouveau personnel politique, de nouveaux visages à promouvoir. La droite, son appareil et ses sympathisants, n’ont finalement pas encore réussi à tourner la page du sarkozysme. Elle a besoin d’un chef, d’un leader, et elle n’en trouve pas. En plus, elle se trouve piégée entre une extrême-droite plus audible, car plus radicale, et un macronisme de gouvernement qui affiche de plus en plus une politique de droite modérée, donc rassurante à certains égards. Comment se différencier à la fois du Rassemblement National et de La République en Marche? Équation insoluble peut-être…? Le parti Les Républicains a l’apparence d’un poulet sans tête qui marcherait entre sa droite et sa gauche sans qu’aucune ligne directrice ne se dégage (Xavier Bertrand au Nord, Valérie Pécresse en Île-de-France ou Christian Estrosi dans le Sud). La droite n’est plus une opposition pour Emmanuel Macron, mais un réservoir de voix. 

Face à ce désert peu dangereux, l’exécutif théâtralise un déluge eschatologique. L’opposant devient ennemi, monstre. Il est un hydre à deux têtes: les verts et l’extrême-droite. Ces deux forces sont les seules en progression. Le parti EELV avec ses alliés a pris de l’importance lors des élections européennes et municipales. Il est encore indéniable que l’écologie constitue aujourd’hui une préoccupation majeure des Français. Tout le monde comprend que cet enjeu d’avenir est fondamental. Il n’est donc pas étonnant que le vote écologiste avance avec la conscience environnementale. Traditionnellement située majoritairement à gauche en France, l’écologie politique ,au-delà de l’environnement, s’est emparée des questions sociétales sur le féminisme, le genre, la religion ou la couleur de peau. Elle rêve de remplacer la gauche et l’extrême-gauche habituelles, en faisant ,sur son programme et son étiquette, un rassemblement de toutes les gauches. Si ce pari réussit, cette union peut s’avérer dangereuse pour le pouvoir en place….Cependant, les bons résultats électoraux ont été obtenus dans des élections avec une faible participation, que ce soit aux européennes comme toujours, ou aux municipales avec la crise sanitaire. Ils ne sont donc pas représentatifs d’une situation normale, en conditions réelles. Surtout, les propos et/ou projets des maires de Lyon ou de Bordeaux posent question. Ce parti peut-il gouverner la France en interdisant le Tour de France ou les sapins de Noël? La présidence a la partie facile pour laisser entendre que les écologistes sont des apprentis-sorciers incohérents et incompétents. Avec ces « énergumènes » au pouvoir, elle sous-entend que ce serait le déluge, la fin du pays. 

Enfin, l’opposition principale dans le pays provient évidemment de Marine le Pen et de son mouvement. Il semble quasi-certain que le Rassemblement National sera présent au second tour de la présidentielle, et que son score sera plus élevé qu’en 2017. Ici, la ligne reste la même: rejet de l’immigration, souveraineté nationale contre accélération de l’intégration européenne, et retour en force de « l’identité française ». Les flous restent aussi les mêmes: qu’en est-il du programme économique, social, éducatif? Cependant, l’exaspération, la colère des Français ne trouvent comme déversoir ou représentant crédible que le Rassemblement National. Si la progression des idées de ce mouvement dans le pays est indéniable, la question se pose de savoir s’il peut franchir les fameux 50%, le fameux « plafond de verre ». En effet, le côté sulfureux du nom Le Pen, l’impossibilité pour l’instant d’alliances politiques au second tour, la détestation des médias et des intellectuels constituent autant de facteurs handicapants pour la victoire finale. L’Elysée en a fait l’opposant principal, à juste titre, et en même temps pour surtout garder cet adversaire. Il est facile une nouvelle fois de le diaboliser, de susciter dans l’inconscient collectif le bruit des bottes allemandes dans les rues de Paris, d’expliquer que son accession au pouvoir serait un déluge de catastrophes…

Le désert des partis traditionnels, ou le déluge des nouvelles oppositions. Le dessin d’un seul choix réalisable et raisonnable s’esquisse, et doit prendre forme dans un an: celui de la continuité. Nous ne sommes plus dans une vision politique, mais stratégique et tactique. Mais qu’en sera-il des législatives? 

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