Marie, Alcools, Apollinaire, 1913, commentaire, analyse.

Marie, Alcools, Apollinaire, 1913.

 

Marie

 

Vous y dansiez petite fille
Y danserez-vous mère-grand
C’est la maclotte qui sautille
Toute les cloches sonneront
Quand donc reviendrez-vous Marie

Les masques sont silencieux
Et la musique est si lointaine
Qu’elle semble venir des cieux
Oui je veux vous aimer mais vous aimer à peine
Et mon mal est délicieux

Les brebis s’en vont dans la neige
Flocons de laine et ceux d’argent
Des soldats passent et que n’ai-je
Un cœur à moi ce cœur changeant
Changeant et puis encor que sais-je

Sais-je où s’en iront tes cheveux
Crépus comme mer qui moutonne
Sais-je où s’en iront tes cheveux
Et tes mains feuilles de l’automne
Que jonchent aussi nos aveux

Je passais au bord de la Seine
Un livre ancien sous le bras
Le fleuve est pareil à ma peine
Il s’écoule et ne tarit pas
Quand donc finira la semaine

Guillaume Apollinaire, Alcools

 

 

Exemple d’un plan de commentaire avec introduction et conclusion du poème « Marie » d’Apollinaire, Alcools, 1913.

(Ceci n’est évidemment pas un modèle, mais un exemple. Vos réflexions personnelles peuvent vous mener vers d’autres pistes de lecture).

 

Introduction :

 

Guillaume Apollinaire, avec Blaise Cendrars, effectue une rupture moderniste dans la poésie, et se pose comme le précurseur du surréalisme. Il se défait des règles de versification et invente de nouvelles formes, comme les Calligrammes. La ponctuation disparaît d’ailleurs dans ses œuvres. Sa modernité apparaît clairement dans son recueil « Alcools » qui paraît en 1913. (accroche avec remise dans le contexte)

Les thèmes d’Alcools sont l’ivresse (comme l’indique son titre), la ville moderne, et l’amour. Ici, le poète évoque une de ses muses, Marie Laurencin, avec qui il a partagé sa vie entre 1907 et 1912. Le texte revient sur sa rupture avec elle, et la douleur ressentie. Il met en rapport des souvenirs heureux et la tristesse de sa situation présente. (présentation du texte)

De quelle manière Apollinaire évoque-t-il sa rupture avec Marie Laurencin ? (problématique)

Nous détaillerons dans un premier temps l l’écriture poétique d’Apollinaire dans ce texte, puis nous étudierons la représentation qu’il construit de son souvenir. (annonce de plan)

(introduction en quatre parties avec : l’accroche, la présentation générale du texte, la problématique et l’annonce de plan).

 

I- L’art poétique d’Apollinaire.

(phrase d’introduction de la partie avec rappel du thème lors de la rédaction)

 

a) Une écriture libre.

 

    • Absence de ponctuation traditionnelle chez l’auteur.
    • 5 quintils : ne correspond pas à une forme fixe comme le sonnet.
    • Rimes relativement régulières dans le poème, et correspondant à la double rime traditionnelle des quintils : de la 2ème strophe à la dernière : structure ababa. Seulement, la première strophe ne suit pas ce schéma : 4 rimes différentes, et pas de modèle.
    • Enfin, si l’octosyllabe est le vers utilisé, un alexandrin vient casser cette régularité au vers 9. Comme nous le verrons de nouveau, ce vers irrégulier pour le poème sert à mettre en avant l’amour de l’auteur pour Marie (répétition « vous aimer »).

 

b) Une poème lyrique et pathétique.

 

    • omniprésence de la première personne du singulier tout au long du texte, sauf dans le première strophe : « je »(v.9,13,15,16,18,21), « mon » (v.10), « moi »(v.14), « ma »(v.23).
    • Expression de ses sentiments personnels, amoureux, qui se détache bien vers 9, avec la répétition du verbe « aimer », ou du mot « coeur »(v.14)
    • souffrance morale du poète, registre pathétique : « mal »(v.10), « peine »(v.23).
    • Apollinaire expose son amour pour Marie, et la souffrance due à leur rupture. Episode réel de sa vie avec le peintre Marie Laurencin entre 1907 et 1912.

 

c) Entre réalité et imaginaire.

 

    • Des indications spatio-temporelles précises : « neige »(v.11, donc l’hiver), « automne »(v.19), « Seine »(v.21), « semaine »(v.25). Ces indicateurs ancrent le récit dans la réalité.
    • De plus, apostrophe direct de marie : « Marie »(v.5), destinataire réel du poème.
    • Rêverie poétique de l’auteur : « masques silencieux »(v.6), nous indique bien que la danse de la première strophe était imaginaire. De plus, association d’idées étrange dans la troisième strophe. Surréalisme en posant un parallélisme entre les brebis et les soldats, entre les flocons de neige et la laine.
    • Enfin, référence poétique à Baudelaire, et à son poème « La Chevelure » (v.16-17), qui était un blason de son ancienne maîtresse Jeanne Duval. Situation semblable à Apollinaire.

 

(phrase de conclusion/transition de la partie lors de la rédaction)

 

II- Le souvenir amoureux.

(phrase d’introduction de la partie avec rappel du thème lors de la rédaction)

 

a) Un portrait de la femme aimée.

 

    • Titre du poème, et nom apparent dès le vers 5. Denier mot de la strophe pour mettre en avant son prénom.
    • Une femme pleine de vie, qui aime la danse dans le première strophe, la maclotte était une danse belge.
    • Une description physique plus précise à travers le quatrième quintil : « cheveux »(v.16,18), « tes mains »(v.4). Ici, le vouvoiement de la première strophe (v1,2,5) est remplacé par le tutoiement. Rapprochement physique des deux amants.
    • Une femme idéalisée avec l’accompagnement de son retour par les cloches (v.4), elle représente donc le bonheur pour le poète.

b) La rupture.

 

    • Marie n’est plus présente aux côtés d’Apollinaire : « Quand reviendrez-vous Marie »(v.5). L’absence de ponctuation marque aussi le fait qu’elle ne répond pas à ses questions, que le poète n’attend d’ailleurs pas de réponse ;
    • Passage de la fête au calme entre la première et la deuxième strophe : « Et la musique est si lointaine »(v.7). La fête de leurs amours est terminée, et pour le poète ces moments paraissent appartenir à un passé révolu : hyperbole « Qu’elle semble venir des cieux »(v.8) qui exagère la distance.
    • Il erre sans savoir quoi penser dans la strophe suivante, et insiste sur la dureté du temps présent avec l’évocation des soldats (v.13). Il est perdu sentimentalement « cœur changeant »(v.14).
    • Dans le quatrième quinitil, souvenir de leur union : « nos aveux »(v.20). Des mots d’amour échangés entre eux deux. Solitude du poète dans la dernière strophe où aucun autre personnage n’est présent. Référence à un autre poème sur sa rupture avec Marie, « Sous le pont Mirabeau » (même situation dans la dernière strophe, même fonction du fleuve représentant ces pleurs, et le temps qui passe).

 

c) La fuite du temps.

 

    • thème central du poème. Les deux premiers vers alternent l’imparfait « dansiez » et le futur « danserez ». Deux états opposés de la vie « petite fille » et « grand-mère ».
    • Cette alternance des temps se remarque dans tout le poème, mais ensuite entre le présent et le futur (strophe 4), avec un imparfait v.21 « passais ». Le présent est le temps principal du texte, car l’auteur nous livre ses émotions sur sa situation actuelle.
    • Dans la dernière strophe, le présent est de vérité générale pour exposer la fatalité de sa situation, comparable au mouvement perpétuel du fleuve. Tragique de la malédiction de l’amour dont il est victime.
    • Le dernier vers renforce cette idée avec un futur « finira », et l’impression donnée que le temps passe lentement. Sa solitude lui pèse et fait de chaque instant sans Marie une éternité. Les moments heureux semblent lointains (strophe 1 et 2).

 

(phrase de conclusion de la partie lors de la rédaction).

 

Conclusion :

 

Le poème Marie a pour thème l’amour, plus précisément une rupture sentimentale, comme souvent dans Alcools. Nous retrouvons encore l’écriture poétique particulière d’Apollinaire sans ponctuation, la frontière floue qu’il existe pour lui entre la réalité et l’imaginaire. Par une tonalité pathétique et lyrique, il nous entraîne dans sa mélancolie et dans sa nostalgie du passé amoureux. Le souvenir le raccroche à Marie, mais, comme elle, il s’éloigne avec le temps qui passe. (réponse à l’annonce de plan).

Le poète exprime son désarroi amoureux en nous montrant son errance présente, son questionnement intérieur. Sa seule certitude est celle de la fuite du temps, et de la tragédie d’un présent solitaire et malheureux. Le passé et le futur peuvent lui apporter de l’espoir, amsi il n’a aucune certitude quant au retour de l’être aimé. (réponse à la problématique).

Dans ce poème, Apollinaire se réfère à d’autres poètes, Baudelaire ou encore Verlaine (avec l’automne). Mais il se réfère surtout à lui-même dans la dernière strophe qui semble directement tiré du deuxième texte du recueil, Sous le pont Mirabeau. (ouverture)

 

(conclusion en trois parties avec la reprise des conclusions partielles, la réponse à la problématique, et l’ouverture).

Contact:lescoursjulien@yahoo.fr

 

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