Le Mariage de Figaro, Acte I (1), scène X (10), commentaire, « Que voulez-vous? » à « faisons vite chercher Marceline », passage de la toque virginale, Beaumarchais,1784.

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Le Mariage de Figaro, Acte I, scène 10, « Que voulez vous ? »à « faisons vite chercher Marceline », Beaumarchais, 1784.

Le Comte, à Figaro.

Que voulez-vous ?

Figaro.

Monseigneur, vos vassaux, touchés de l’abolition d’un certain droit fâcheux que votre amour pour madame…

Le Comte.

Hé bien, ce droit n’existe plus : que veux-tu dire ?

Figaro, malignement.

Qu’il est bien temps que la vertu d’un si bon maître éclate ! Elle m’est d’un tel avantage aujourd’hui, que je désire être le premier à la célébrer à mes noces.

Le Comte, plus embarrassé.

Tu te moques, ami ! l’abolition d’un droit honteux n’est que l’acquit d’une dette envers l’honnêteté. Un Espagnol peut vouloir conquérir la beauté par des soins ; mais en exiger le premier, le plus doux emploi, comme une servile redevance : ah ! c’est la tyrannie d’un Vandale, et non le droit avoué d’un noble Castillan.

Figaro, tenant Suzanne par la main.

Permettez donc que cette jeune créature, de qui votre sagesse a préservé l’honneur, reçoive de votre main publiquement la toque virginale, ornée de plumes et de rubans blancs, symbole de la pureté de vos intentions : adoptez-en la cérémonie pour tous les mariages, et qu’un quatrain chanté en chœur rappelle à jamais le souvenir…

Le Comte, embarrassé.

Si je ne savais pas qu’amoureux, poëte et musicien, sont trois titres d’indulgence pour toutes les folies…

Figaro.

Joignez-vous à moi, mes amis !

Tous ensemble

Monseigneur ! monseigneur !

Suzanne, au Comte.

Pourquoi fuir un éloge que vous méritez si bien ?

Le Comte, à part.

La perfide !

Figaro.

Regardez-la donc, monseigneur ; jamais plus jolie fiancée ne montrera mieux la grandeur de votre sacrifice.

Suzanne.

Laisse là ma figure, et ne vantons que sa vertu.

Le Comte, à part.

C’est un jeu que tout ceci.

La Comtesse.

Je me joins à eux, monsieur le comte ; et cette cérémonie me sera toujours chère, puisqu’elle doit son motif à l’amour charmant que vous aviez pour moi.

Le Comte.

Que j’ai toujours, madame ; et c’est à ce titre que je me rends.

Tous ensemble

Vivat !

Le Comte, à part.

Je suis pris. (Haut.) Pour que la cérémonie eût un peu plus d’éclat, je voudrais seulement qu’on la remît à tantôt. (À part.) Faisons vite chercher Marceline.

Exemple d’un plan de commentaire de l’extrait du Mariage de Figaro, Acte I, scène 10  « Que voulez vous ? »à « faisons vite chercher Marceline », Beaumarchais, 1784.

(Ceci n’est pas un modèle, mais simplement un exemple. Votre réflexion personnelle peut évidemment mener à d’autres pistes de lecture)

Introduction :

 

Pièce qui connut un grand succès durant l’Ancien Régime, une fois la période de censure dépassée (écrite en 1778, jouée à partir de 1784), le Mariage de Figaro constitue le second volet d’une trilogie sur la famille Almaviva, qui débute avec le Barbier de Séville (1775) et se termine avec la Mère coupable (1792). Le théâtre de Beaumarchais est à son image, plein de rebondissements, pour un homme qui fut marié trois fois, inventeur, musicien, voyageur, financier, agent secret et trafiquant d’armes. Si son expression est la plupart du temps comique, ses préoccupations sont celles de son temps, du temps des Lumières et de la remise en cause des traditions de l’Ancien régime.(accroche avec informations sur l’auteur et son œuvre)

Le Mariage de Figaro nous conte de manière comique les ruses employées par Figaro afin d’épouser son amoureuse Suzanne, sans que le comte Almaviva ne puisse s’y opposer ou exercer sur Suzanne son droit de cuissage. Les rebondissements sont multiples, et la victoire du valet sur le maître constitue le dénouement, après « une folle journée »(sous-titre de l’oeuvre). L’extrait présenté ici se situe à la fin du premier acte, et voit Figaro tenter de piéger son maître afin devant témoins afin qu’il ne rétablisse pas le droit de cuissage. (présentation de l’oeuvre et du passage)

De quelle manière Figaro piège-t-il le comte ? (réponse à la problématique)

Tout d’abord, nous montrerons le caractère fortement théâtral de ce passage.Dans unsecond temps, nous analyserons la stratégie de Figaro.Enfin, nous mettrons en avant l’inversion des pouvoirs dans la relation maître-valet entre le comte et Figaro. (annonce du plan)

 

(introduction en quatre étapes : amorce avec informations sur l’auteur, présentation générale du texte, problématique, annonce du plan).

 

I- Une scène comique et théâtrale.

(phrase d’introduction de la partie avec rappel du thème lors de la rédaction)

 

a) Le registre comique.

    • ironie très présente dans le passage lors des compliments adressés au comte comme avec l’hyperbole « si bon maître », ou avec l’euphémisme « droit fâcheux » désignant l’horreur du droit de cuissage.
    • Comique de situation créé par la foule présente qui embarrasse le comte, qui ne peut s’exprimer librement : didascalie « plus embarrassé », ou aparté « à part, – La perfide »
    • Enfin, le spectateur au courant de la détermination du comte à exercer son droit de cuissage sur Suzanne ne peut que sourire face aux mensonges de ce dernier : « Hé bien ce droit n’existe plus ».

 

b) La mise en abîme du théâtre.

 

    • le passage voit tous les acteurs jouer un rôle du théâtre à l’intérieur de la scène.
    • Déjà, nous sommes face à une représentation puisque nous assistons à une cérémonie, celle de la toque virginale.
    • Ensuite, la foule présente symbolise évidemment les spectateurs d’une pièce. Ils apprécient d’ailleurs la représentation puisqu’ils expriment leur contentement : « Tous ensemble – Vivat ! »
    • Figaro est à la fois le metteur en scène et l’auteur, car il dirige la manœuvre : « Joignez-vous à moi, mes amis ! ». Il est aussi acteur de la scène, il joue le rôle de laudateur du comte : « la vertu d’un si bon maître ».
    • Suzanne et la comtesse participent elles-aussi à ce faux éloge du comte.
    • Enfin, le comte est obligé de se contenir, et campe ainsi le rôle du gentilhomme : « l’abolition d’un droit honteux ». Il sait cependant qu’il participe contraint à une pièce de théâtre :  « C’est un jeu que tout ceci ».(phrase de conclusion/transition à la fin de la partie lors de la rédaction)

II- La stratégie de Figaro.

(Phrase d’introduction de la partie avec rappel du thème lors de la rédaction)

a).   Le faux éloge. 

  • Éloges adressés au comte par Figaro et Suzanne: « la vertu d’un si bon maître », « votre sagesse », « la pureté de vos intentions », « un éloge que vous méritez si bien ». Portrait moral d’un homme bon et respectueux.
  • Thème de ces compliments: la décision d’arrêter la tradition du droits de cuissage: « l’abolition d’un certain droit fâcheux ».
  • Le comte est pris dans le jeu de Figaro, et ne peut qu’accepter ces éloges: « N’est que l’acquis d’une dette envers l’honnêteté ».

b) Une mise en scène qui piège le comte.

  • La foule est prise comme témoin par Figaro: « Joignez-vous à moi mes amis ! »
  • Figaro souhaite montrer à tous l’abandon réel du droit de cuissage par le comte en le conviant à participer à la remise de la toque virginale, symbolisant la pureté de Suzanne avant son mariage: « reçoive de votre main publiquement la toque virginale ».
  • Aparté du comte qui démontre qu’il se sait pris au piège et qu’il ne peut s’exprimer ouvertement, librement: « La perfide! ».
  • L’aparté agit comme une double énonciation, car elle informe aussi le public sur le ressenti du comte par rapport à la situation.

(phrase de conclusion/transition lors de la rédaction)

III- Une inversion des pouvoirs, miroir des Lumières.

(phrase d’Introduction avec rappel du thème de la partie lors de la rédaction)

a).    La solitude et l’impuissance du comte.

  • comte seul, isolé face à plusieurs personnages: Figaro, Suzanne, la comtesse et la foule. Isolement qui représente sa perte de pouvoir.
  • Il doit contenter sa maisonnée en abandonnant en apparence ses désirs.
  • A ce moment de la pièce, le pouvoir se situe entre les mains de personnages qu’on ne s’attend pas à voir gouverner: les valets et la comtesse.
  • Situation contre la volonté du comte. Nouveauté pour lui habitué à décider de tout pour tout le monde. Position de faiblesse contraire à son habituelle force.

b) Un texte des Lumières.

  • texte éclairé qui défend à la fois la condition sociale des valets, et celle des femmes en condamnant le droit de cuissage. Critique d’une injustice, même dans la bouche du comte.
  • Beaumarchais fait triompher l’intelligence et la malice du valet sur la force et les privilèges du comte.
  • Inversion de la relation maître-valet qui montre que la société d’ordre n’est pas immuable.
  • Enfin, avec humour, il oblige le comte, devant les flatteries qu’il reçoit, à se présenter comme un homme éclairé, qui embrasse la modernité. Malgré lui, il défend des valeurs des Lumières.

(phrase de conclusion de la partie lors de la rédaction)

Conclusion: 

Le Mariage de Figaro est une pièce comique portant une argumentation polémique sur les droits seigneuriaux. Dans le passage étudié, Figaro monte un piège contre son maître pour le faire abandonner définitivement le droit de cuissage, et ainsi protéger sa future femme (Suzanne) des désirs de son maître. Sa stratégie s’avère efficace, puisqu’il contraint le comte à reculer publiquement. Almaviva devient un personnage ridicule embarrassé par la situation, sans toutefois pouvoir laisser éclater sa colère. (réponse à l’annonce de plan, reprise des conclusions des parties)

La portée comique de la scène mène à une réflexion sur le droit de cuissage, sur les privilèges de la noblesse. L’incapacité du comte à justifier le retour de cette pratique odieuse et injuste rappelle l’esprit des Lumières qui habite l’oeuvre de Beaumarchais. (réponse à la problématique)

Dans la pièce précédente de la trilogie, Le Barbier de Séville, Beaumarchais avait laissé à Figaro un rôle plus traditionnel de valet, qui aidait le comte dans une démarche de séduction. (Ouverture vers une autre œuvre)

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