Est-il rien de plus vain qu’un songe mensonger , La vie est un songe, Chassignet, 1594, Le Mépris de la vie et consolation pour la mort, commentaire, analyse.

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La vie est un songe, Le Mépris de la vie et consolation contre la mort, 1594, J-B Chassignet.

La vie est un songe.

Est-il rien de plus vain q’un songe mensonger

Un songe passager, vagabond et muable ?

La vie est toutefois au songe comparable,

Au songe vagabond, muable et passager ;

 

Est-il rien de plus vain que l’ombrage léger,

L’ombrage remuant, inconstant et peu stable ?

La vie est toutefois à l’ombrage semblable,

A l’ombrage tremblant sous l’arbre d’un verger ;

 

Aussi pour nous laisser une preuve assurée

Que cette vie était seulement une entrée

Et départ de ce lieu, entra soudainement

 

Le sage Pythagore en sa chambre secrète

Et n’y fut point si tôt, ô preuve bientôt faite !

Comme il en ressortit encor plus vitement.

Exemple d’un plan de commentaire avec introduction et conclusion du poème « La vie est un songe », Le Mépris de la vie et consolation contre la mort, 1594, Chassignet.

(Ceci n’est évidemment pas un modèle, mais un exemple. Votre réflexion personnelle peut mener à d’autres pistes de lecture).

Introduction :

J-B Chassignet est un poète essentiel de la période baroque par son œuvre de jeunesse Le Mépris de la vie et la consolation par la mort (1594). Sa vie reste mystérieuse, d’autant plus qu’il semble abandonner la poésie ensuite pour se consacrer à sa carrière de conseiller et avocat fiscal au baillage de Grey. (accroche avec informations sur l’auteur).

Composé de 434 sonnets, son recueil porte une vision apocalyptique, qui répond aux troubles de son époque (fin des guerres de religion en France). Le texte présenté ici est le sonnet 263. Il nous offre une définition de la vie, qui insiste sur ses caractéristiques baroques(présentation du texte).

En quoi ce sonnet constitue-t-il une leçon, une morale baroque sur la vie?(problématique)

Chassignet construit un sonnet régulier, remarquable par son rythme, sa symétrie, mais aussi par la rupture brutale qui le divise. Ceci participe d’ailleurs à la tonalité baroque de l’ensemble du poème, dans lequel les thèmes de l’inconstance et de la vanité sont centraux. Le texte apparaît alors comme didactique par la volonté de l’auteur de convaincre le lecteur de sa vision de la vie. (annonce de plan).

(introduction en quatre parties : accroche, présentation du texte, problématique, annonce de plan).

I- Un sonnet traditionnel et déroutant.

(phrase d’introduction de la partie avec rappel du thème lors de la rédaction)

a) Un sonnet régulier.

    • présente les rimes traditionnelles du sonnet : abba, abba, cce, dde : « er », « able », « abl », « er » (idem pour la deuxième strophe) , « ée », « ée », « ment », « ète », « aite », « ment ».
    • Alternance rimes masculines/féminines. Le vers choisi est l’alexandrin, comme souvent dans les sonnets dans la seconde moitié du XVIème siècle, avec la césure à l’hémistiche : « Un songe passager, / vagabond et muable ? « (v.2), ou « Que cette vie était, / seulement une entrée »(v.10)
    • Les deux premiers quatrains se focalisent sur le même thème, celui de la vie : vers 3 et 7.
    • La dernière strophe constitue la chute du poème, comme l’indique le seul point du texte : « plus vitement». Ceci met un terme définitif au texte.

b) Rythme symétrique et basculement.

    • rythme rapide et saccadé des deux premiers quatrains avec une ponctuation abondante (,, ;,?), des énumérations (« passager, vagabond et muable ? « (v.2), « vagabond muable et passager »(v.4), idem v. 6), et des répétitions : « songe »(v.1,2,3,4), « ombrage »(v.5,6,7,8).
    • Les deux strophes sont construites sur des structures presque symétriques. Question anaphorique pour débuter les strophes : « Est-il rien de plus vain… »(v.1 et 5), la question se termine aux vers suivants « ? » (v.2 et 6). De même, la formule « La vie est toutefois » est aussi anaphorique aux vers 3 et 7.
    • Cependant, cette construction parfaite subit un premier accroc au vers 8, quand il ne reprend pas l’énumération du vers 6, contrairement aux vers 2 et 4 : « L’ombrage remuant… » devient « l’ombrage tremblant.. ».
    • Ce premier changement nous prépare au changement de rythme des deux derniers tercets dans lesquels la ponctuation est beaucoup plus réduite, et les enjambements fréquents : vers 9-10, 10-11, 11-12…le poème devient plus fluide ; et son ambition n’est plus au questionnement, mais à la certitude : « une preuve assurée »(v.9)

(phrase de conclusion/transition de la partie lors de la rédaction)

II- Les thèmes baroques du poème.

(phrase d’introduction de la partie avec rappel du thème lors de la rédaction)

a) L’inconstance et l’illusion.

    • Le songe est un élément central dans la littérature baroque (La vie est un songe, Calderon, 1635, ou Songe d’une nuit d’été, Shakespeare, 1594-1595)
    • Le terme occupe l’ensemble de la première strophe, et s’apparente à une illusion quand il est qualifié de « mensonger »(v.1), ou de « muable »(v.2 et 4)
    • De même, l’ombre est dans le baroque symbole d’instabilité, puisqu’elle paraît toujours fuyante : « L’ombrage remuant, inconstant et peu stable ? » (v.6). Cette inconstance est marquée par le mouvement tout au long du poème : « passager, vagabond »(v.2), « remuant »(v.6), « tremblant »(v.8). Ce mouvement devient beaucoup plus rapide et tourbillonnant dans ls deux tercets : « entra soudainement »(v.11), « si tôt »(v.13), « encor plus vitement »(v.14)
    • Rien n’apparaît sûr, solide ou figé.

b) La vanité.

    • thème central du baroque. La vanité est étymologiquement « un souffle léger, une vapeur éphémère », qui s’applique au caractère précaire, vide, et passager de la vie humaine.
    • Ainsi, les trois premières strophes utilisent des comparaisons et des des métaphores afin de montrer la nature éphémère de la vie : « La vie est toutefois au songe comparable »(comparaison, v.3), « La vie est toutefois à l’ombrage semblable »(comparaison, v.6), « Que cette vie était seulement une entrée/Et départ de ce lieu.. »(métaphore, v.10-11).
    • L’anaphore hyperbolique « Est-il rien de plus vain… »associe au songe et à l’ombrage la vanité, pour ensuite la transposer à la vie humaine. De même, l’adverbe « seulement »(v.10) réduit la vie à un éphémère passage sur cette terre (« ce lieu » v.11) où l’ « entrée » et le « départ » sont si rapprochés (juste la conjonction « et » les sépare).
    • Ce thème de la vanité est bien entendu le sujet baroque du poème (comme rappelé par la répétition de « vain » vers 1 et 5).

(phrase de conclusion/transition de la partie lors de la rédaction)

III- Un poème didactique.

(phrase d’introduction de la partie avec rappel du thème lors de la rédaction)

a) Une argumentation en apparence convaincante.

    • le texte possède plusieurs procédés argumentatifs qui visent à faire réfléchir le lecteur et à faire progresser le raisonnement de l’auteur.
    • Tout d’abord, questions rhétoriques des deux premières strophes : vers 2 et 6. L’auteur nous donne ensuite la réponse dans les vers 3-4 et 7-8. Ceci vise à faire progresser son raisonnement.
    • Utilisation du présent de vérité générale : « La vie est toutefois… »(v.3 et 4). La conclusion avancée ne supporte pas de contradiction. Elle est renforcée par l’argument d’autorité qui suit dans la référence à Pythagore v. 12.
    • Il essaie de convaincre le lecteur par une apparence d’argumentation : connecteurs logiques : « toutefois »(v.3 et 7) « Aussi »(v.9). Etapes d’une démonstration avec un raisonnement par comparaison au départ (les deux premières strophes), puis un résultat général ensuite appuyé par une « preuve »(v.9 et 13)

b) Une morale plus qu’un raisonnement.

    • insistance sur la « preuve » par le point d’exclamation et l’apostrophe : « ô preuve bientôt faite ! », or celle-ci n’existe pas, elle n’a pas été apportée ou expliquée. La preuve dont il est question est certainement le théorème de Pythagore, et non celle de la vanité de la vie.
    • De manière générale, les répétitions, la symétrie, le rythme saccadé puis fluide visent à installer une progression naturelle et lancinante qui s’apparente à un raisonnement mathématique (d’où la symétrie des deux premières strophes)
    • Cependant, la démonstration perd de son crédit dans le dernier tercet, qui possède un caractère comique par rapidité des actions, et l’absurdité de la situation par rapport au sujet de la vanité : la situation parfaitement banale d’un homme qui entre et sort d’une pièce paraît puérile pour démontrer le caractère éphémère et inconstant de l’existence.
    • Ce texte nous transmet donc plutôt une morale personnelle de l’auteur sur la vie, qu’un raisonnement logique et pertinent.

(phrase de conclusion de la partie lors de la rédaction).

Conclusion :

Chassignet respecte la forme régulière du sonnet, mais joue sur la rythmique et les thèmes abordés pour partager son texte en deux parties distinctes : les symétriques comparaisons rythmées des deux quatrains, qui précèdent la chute mouvementée et absurde des deux tercets. Si les thèmes baroques de l’illusion et de l’inconstance soulignent l’appartenance de ce sonnet au baroque, c’est avant tout le thème philosophique de la vanité qui le rapproche d’une réflexion de son époque. Dès lors, le lecteur s’aperoit de la volonté didactique de l’auteur, qui cherche à le convaincre maladroitement de la règle générale de la précarité de la vie.(réponse à l’annonce de plan)

La morale est donc baroque dans son essence : la vie est pareille à un songe ou une ombre, elle est mensongère, inconstante et passagère. Seulement, la preuve tant attendue ne vient pas. A la place, Chassignet nous emmène dans une situation cocasse dans laquelle il fait intervenir un Pythagore étrange. Ce bouleversement bizarre apporte en plus du fond, une forme baroque à la morale du poème. (réponse à la problématique)

Cette attention particulière sur la vanité de la vie se retrouve durant toute la période baroque. Marqués par les guerres de Religion, et leurs nombreux massacres, les contemporains ressentaient avec acuité la fragilité de l’existence. Ils n’hésitaient pas d’ailleurs à dépeindre crûment la mort, comme dans le sonnet 125 du même recueil de Chassignet «Le spectacle de la mort ». (ouverture)

(conclusion en trois parties avec la réponse à l’annonce de plan, la réponse à la problématique, et l’ouverture)

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